13/05/2007

Les blogs & la valeur du lien

Virtuels mais personnels, ouverts, libres et mouvants. C’est ainsi que pourraient se définir les liens échangés sur la blogosphère. La toile permet de tisser un réseau de relations interactives qui tiennent davantage du néo-tribalisme que des groupes sociaux. En effet, les groupes constitués sur Internet ne correspondent plus aux classifications admises. Ils ne se contentent plus d’être primaires (exemple : la famille), secondaires (exemple : un syndicat) ou même latents (exemple : la catégorie professionnelle). Ils sont un peu de tout cela et rien de tout cela et s’apparentent plus sûrement au néo tribalisme.

V. et B. Cova définissent le néo tribalisme par :
- un désir de relation immédiate,
- un désir de connexion collective,
- un désir d’expérience d’un tout qui ait du sens,
- un désir de créer un nouvel ensemble

« C’est le lien entre les individus, ce qui relie deux ou plusieurs individus, qui est au coeur d’une approche tribale de la consommation et non l’individu lui-même, isolé, qui passionne tant le marketeur relationnel et sa variante one to one. Ainsi, on ne se focalise plus sur la relation dyadique entreprise / client mais sur la relation tribale client / client / client etc».

Ainsi, on assiste à une influence grandissante des jugements du groupe sur les choix individuels au détriment des liens qui pouvaient attacher le consommateur à la marque. Le lien affiché par l’objet devient plus important que le bien lui même (Cova B. 1996 Leçon de marketing “post-moderne”). Certains parlent de retour des clans, d’autres de primauté des relations avec les pairs. L ’individu recherche une nouvelle forme de relation avec les autres, plus sélective et plus profonde, fondée sur une identification réciproque. Bien qu’un leader ne soit pas forcément un innovateur, ses opinions sur les produits et les marques sont acceptées et se diffusent au sein des “tribus ”correspondant à sa zone d ’attraction. Les jugements du leader sont naturellement imités par son entourage, car ils représentent une forme d’adhésion aux normes du groupe, un prix à payer pour être intégré dans le réseau relationnel.

Cependant, la marque ou l’entreprise ne doivent pas imaginer être ici admise comme le totem autours duquel se réunirait la tribu. Certes non. La blogosphère implique d’autres règles. Les marques peuvent envisager d’entrer dans le cercle … mais difficilement l’orchestrer.

Partout on le constate : il existe un malaise profond entre les marques et les consommateurs. Un dénigrement des outils de la communication et une défiance des consommateurs pour toutes les promesses faites et non tenues.

« Les marques ont perdu de la chair, du relief, elles sont aujourd'hui remises en cause et jugées par un consommateur qui n'est plus dupe. La distance affective entre la marque et le consommateur s'agrandit de plus en plus. Incarner les marques permet alors plus que jamais de recréer du lien avec le consommateur. Mais cette incarnation semble de plus en plus s'inspirer de l'univers du consommateur et non de la marque elle-même. En 2006, l'incarnation des marques acquiert une autre dimension. Elle répond à l'évolution du contrat égalitaire que les marques veulent passer avec le consommateur. » Catherine Veillé sur ipsos.com juin 2006

« C’est l’idée d’introduire cette relation horizontale entre annonceurs et consommateurs versus la relation très verticale que nous subissons depuis des décennies par les marques devenues des autorités au même titre que les institutions politiques… La très grande majorité des campagnes qui ressortent dans ce palmarès Ipsos que ce soient en Affichage ou en Télévision se distinguent par la présence et l’interpellation affirmée du ‘consomacteurs’ dans la publicité. L’analyse en détail des publicités qui ont le plus marquées les Français en 2006, c'est-à-dire à la fois celles qui ont été les plus appréciées mais aussi celles qui ont été les mieux mémorisées, ce qui frappe d’entrée c’est la très grande connivence qui s’est construite entre les Marques et le public » Benoit Tranzer, présentation du palmarès de la publicité 2006.

La blogosphère en cela n’impose pas davantage. Mais dans cet univers, sans doute plus encore qu’ailleurs, la marque doit se sentir l’invité, l’obligé de son hôte et se présenter en utilisant les codes qui sont en vigueur. Exercice d’autant plus périlleux que les codes sont instables et que ce qui est concédé à l’un peut être reproché à l’autre.

Et puis, dans cet univers, il est un usage qui échappe à la logique du marketing. La blogosphère est avant tout un espace de l’échange et de la gratuité. Le marchand y prend place mais dans ce premier cadre imposé. Cette particularité n’est pas sans conséquence. On échange, on donne, on offre.

« Prenons le cas de la recherche, la recherche savante. Lors d’un colloque, un chercheur donne des résultats, d’autres l’écoutent et lui en communiquent en retour. Tout est gratuit. Certes, ces chercheurs iront peut-être ensuite monnayer leur savoir dans un labo. Pharmaceutique. Peut être. Mais ce qui est essentiel, c’est l’acte lui même qui est anti économique et que l’économie ne peut pas comprendre : je donne quelque chose qui m’appartient, mon avoir, et pourtant je ne perds rien ! Et dans cette gratuité, nous sommes plus riches à l’arrivée l’un et l’autre. Tout simplement impensable pour le marché où tout ce qui est à moi n’est pas à toi.» Bernard Maris

17:20 Publié dans 3.1 Blogs | Lien permanent | Commentaires (0)

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