24/06/2007
La pub. mise à la question sur marketingisdead
Entretien sur marketingisdead - le blog de François Laurent - avec Alyette Defrance :
François Laurent :
"Tout au long des dernières années du 20ème siècle, les archétypes véhiculés par la publicité se révélaient aspirationnels pour les consommateurs : la publicité pouvait générer de l’exclusion, elle générait avant tout de la séduction. Il me semble aujourd’hui qu’elle se fige dans un discours purement formel : les archétypes sont toujours présents, pas nécessairement la séduction. Dès lors, la publicité ne risque-t-elle pas de créer un monde parallèle, de plus en plus déconnecté du réel, et décroissant en efficacité ?"
Alyette Defrance :
"Je ne sais si les archétypes, ou du moins les stéréotypes, sont aujourd’hui plus figés et si le modèle aspirationnel est en panne de manière aussi globale et péremptoire que tu le donnes à entendre.
Mais tu as sans doute raison de revenir sur une question centrale pour la publicité : celle du Faire Croire et de ses modalités.
Ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement la grammaire de production (les archétypes et les stéréotypes générés par le discours publicitaire), mais la grammaire de réception, l’horizon d’attente des récepteurs et le type de relation attendu."
François Laurent :
"Comment la Publicité construit-elle du Faire Croire aujourd’hui ?"
Alyette Defrance :
"Dans une période où le modèle de consommation est remis en cause (No Logo, mouvements anti-pub… ), sans qu’il y ait pour autant un refus de consommer, mais la volonté de consommer autrement (cf. les Alter consommateurs), le consommateur se montre plus rétif face à une publicité qui afficherait ouvertement la prétention de lui fournir des modèles.
Dans ce contexte de distance critique, la publicité se transforme, se modifie, se renouvelle, s’enrichit. Bref, elle trouve d’autres chemins que celui de l’identification aspirationnelle directe. Elle instaure d’autres relations avec le consommateur : l’adhésion peut ainsi se créer par l’humour et la complicité, on le sait. Plus largement, dans la publicité dite « Post-Moderne », le signe importe plus que le sens. La publicité est devenue un haut lieu de production de jeux iconiques et linguistiques qui interpellent le consommateur, en le construisant comme co-acteur, co-auteur de la publicité.
La publicité crée de plus en plus des « mondes publicitaires » où se référer à un monde externe ou aux qualités du produit devient moins important que créer un jeu autour de la marque, c’est-à-dire créer une relation.
La publicité fonctionne moins comme exemple culturel direct et davantage comme intrigue visuelle, jeu de langage (Wazup, dès 1999).
Mais à côté de cette transformation majeure, ne l’oublions pas, d’autres modes de fonctionnement perdurent, sans être pour autant obsolètes. Selon les cibles et les contextes énonciatifs, selon les secteurs, les modes de fonctionnement varient et leur efficacité aussi.
Même si les publicités qui « matraquent » suscitent souvent des réactions d’agacement, elles s’appuient sur une théorie ancienne, celle de la répétition nécessaire à l’apprentissage, qui s’avère toujours efficace lors du lancement de nouvelles marques (118 218).
Les mythes et les archétypes, nés de la théorie du désir et de l’inconscient, ont marqué l’imagination avec des publicités comme Malboro. Ont-elles vraiment disparu ou perdu de leur efficacité ? Comment fonctionnent aujourd’hui les pub parfums, si ce n’est sur des archétypes de la Femme ? L’Oréal continue à jouer ce modèle aspirationnel, à travers des stars et conserve sa position de leader mondial. Dans la Mode, le nombre de marques qui font ainsi appel à des égéries n’a cessé de croître. Dans l’univers du voyage aussi, le modèle aspirationnel continue à fonctionner à travers des stéréotypes (de paysages, de lieux, tout autant que de personnages).
Et lorsque le stéréotype repose sur l’émotion, l’affectif comme celui du petit garçon qui gronde son poisson rouge, Maurice, soi-disant fautif, n’avons-nous pas tous craqué ?
LG enfin, crée son Washbar. N’est-ce pas un nouveau mode relationnel qui est proposé, nouvelle manière d’être aspirationnelle pour une certaine cible (célibataires trentenaires, par exemple).
On est donc loin d’un scénario style « Chronique d’une mort annoncée » pour la publicité.
Selon les cibles et les contextes énonciatifs, les modes de fonctionnement varient et leur efficacité aussi. La publicité se nourrit même des critiques et des résistances : elle les intègre et, tel le Phénix, renaît de ses cendres."
Sur http://marketingisdead.blogspirit.com/
22:20 Publié dans 2.2 Pub | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : publicité
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